Hippo-Actu : Le bilan de 6 ans des entretiens professionnels
1.Les enjeux de la réforme
Les enjeux de la réforme sont de :
a. sécuriser les parcours professionnels au niveau individuel et collectif de l’entreprise :
- en améliorant l’orientation professionnelle et en permettant un meilleur accès à la formation professionnelle notamment pour les personnes qui en ont le plus besoin ;
- en permettant de se former au moment opportun, indépendamment de son statut, et de s’élever d’au moins un niveau de qualification pour réussir son évolution professionnelle.
b. Concevoir la formation professionnelle :
- comme levier de la promotion sociale et professionnelle ;
- comme un investissement et non une charge pour les entreprises car les compétences et qualifications des salariés sont des facteurs de compétitivité.
Le passage d’une obligation fiscale à une obligation sociale issue de la réforme financière de la formation professionnelle est abordé dans un autre article.
2. L’obligation de l’entretien professionnel tous les 2 ans
L’objectif de l’entretien professionnel est d’élaborer le projet professionnel du salarié. Il est donc consacré aux perspectives d’évolutions et aux actions de maintien de son employabilité.
Les entretiens professionnels sont obligatoires dans toutes les entreprises d’au moins 50 salariés depuis l’entrée en vigueur de la loi n°2014-288 du 5 mars 2014, relative à la formation professionnelle, à l'emploi et à la démocratie sociale, soit dès le 7 mars 2014. Ces entretiens doivent être mis en place tous les deux ans. Cette durée s’apprécie par référence à l’ancienneté du salarié dans l’entreprise.
Cette obligation est inscrite dans le Code du travail (article L. 6315-1). Elle incombe à l’employeur. L’entretien professionnel dans la TPE sera le plus souvent réalisé par l’employeur lui-même. Dans les autres entreprises, moyennes et grandes, son organisation et sa réalisation pourront être confiées, sous sa responsabilité, aux managers de proximité ou au responsable des ressources humaines en lien avec les managers de proximité.
En plus de l’obligation tous les 2 ans, l’entretien professionnel doit être systématiquement proposé à tout salarié qui reprend son activité après une période d’interruption due à :
- un congé de maternité
- un congé parental à temps plein ou partiel
- un congé de proche aidant
- un congé d’adoption
- un congé sabbatique
- une période de mobilité volontaire sécurisée
- un arrêt maladie de plus de 6 mois
Depuis le 1er janvier 2019 cet entretien peut avoir lieu à l’initiative du salarié à une date antérieure à la reprise de poste (cette possibilité n’était auparavant possible qu’avant la fin d’un congé parental d’éducation).
L’entretien professionnel concerne tous les salariés en CDI, CDD et temps partiels des entreprises d’au moins 50 salariés.
3. Quel support d’entretien professionnel utiliser ?
Les points obligatoirement abordés au cours de l’entretien professionnel concernent :
- l’évolution professionnelle du salarié, notamment en termes de qualification et d’emploi
- les questions relatives au suivi des actions de formation, de certification et de progression salariale ou professionnelle du salarié
- l’évaluation de son employabilité
- la réflexion sur l’avenir du salarié, le poste occupé et son projet professionnel
http://www.vae.gouv.fr/IMG/pdf/o36-entretien_professionnel_290115.pdf
Ce support proposé par le gouvernement comprend également des questions très pertinentes.
L’entretien professionnel est un droit pour le salarié, qui peut donc le refuser. Il est recommandé de conserver une trace écrite de ce refus.
L’employeur devra consulter le CSE sur le nombre de salariés ayant suivi un entretien professionnel, dans le cadre de la politique sociale.
4. Entretien professionnel de bilan/état des lieux obligatoire au bout de 6 ans
Une capitalisation des entretiens professionnels permet à l’entreprise :
- d’asseoir son plan de développement des compétences (plan de formation)
- de mieux penser le lien entre sa stratégie économique et les aspirations et les potentiels de ses salariés
- d’articuler son action avec la mise en œuvre individuelle du compte personnel de formation (CPF applicable depuis le 1er janvier 2015), mais aussi d’initier une démarche de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences (GPEC)
Des explications sur l’interprétation des rubriques obligatoires associées à l’entretien professionnel
- Les formations éligibles au bilan de l’entretien professionnel
Les formations qui concourent au développement des compétences des salariés et, notamment, celles qui ont pour objet de : - favoriser l'adaptation des salariés à leur poste de travail, à l'évolution des emplois ainsi que leur maintien dans l'emploi ;
- participer au développement de leurs compétences en lien ou non avec leur poste de travail ;
- permettre à des travailleurs d'acquérir une qualification plus élevée.
- La progression salariale du salarié s’apprécie tant à la fois au niveau individuel que collectif
- La progression professionnelle comprend :
- la progression verticale, au niveau des différents échelons hiérarchiques
- la mobilité horizontale, qui consiste en une progression en termes de responsabilités ou en un changement de métier
- Une formation obligatoire :
- Toutes les formations répondant à la définition mentionnée à l'article L.6321-2 du code du travail ;
- les autres actions du plan de développement des compétences qui sont imposées par l’employeur à son initiative.
5. Les sanctions selon les résultats du bilan/état des lieux
La loi de modernisation sociale de 2014 prévoit (dispositif prolongé par l’ordonnance du 21 août 2019) un abondement du compte personnel de formation (CPF), si l’entreprise, d’au moins cinquante salariés, ne justifie pas de l’accomplissement de ses obligations auprès de ses salariés. Ceux-ci doivent bénéficier au cours des 6 dernières années des entretiens prévus tous les 2 ans :
- du suivi d’au moins une action de formation ;
- de l’acquisition des éléments de certification ;
- du bénéficié d’une progression salariale ou professionnelle.
Le bilan des entretiens professionnels doit présenter au moins deux obligations sur les trois identifiées .
Sous réserve de l’appréciation des juges, l’absence d’entretien professionnel pourrait être constitutive d’une faute pour l’employeur dans le cadre de l’exécution d’un contrat de travail.
Par ailleurs, depuis la loi du 5 septembre 2018 relative à l’avenir professionnel, lorsqu’au cours des six dernières années le salarié n’a pas bénéficié des entretiens prévus et d’au moins une action de formation non obligatoire, l’employeur doit abonder le compte personnel de formation d’un montant de 3 000€ pour un salarié à temps complet ou à temps partiel. Cette règle sera la seule applicable à compter du 1er janvier 2021. Le compte personnel est abondé dans les conditions définies à l'article L. 6323-13 du Code du travail.
Chaque année, avant le 1er mars, l’employeur adresse à son opérateur de compétences (OPCO) la liste des salariés concernés par l’abondement correctif et le montant en euros attribué ainsi que la somme forfaitaire. À défaut ou en cas de versement insuffisant, après mise en demeure, il devra verser le double de l’insuffisance constatée au Trésor public.
Enfin, la loi du 5 septembre 2018 permet qu’un accord d’entreprise ou, à défaut, de branche, puisse prévoir :
- des modalités d’appréciation différente du parcours lors de l’entretien bilan effectué tous les 6 ans ;
- une autre périodicité d’entretien ;
- ou, des critères d’abondement plus favorables aux salariés.
Un contrôle du bilan/état des lieux est susceptible d’être réalisé par les agents des services régionaux de contrôle de la formation professionnelle des DIRECCTE.
Le dispositif du CPF est détaillé dans un article Hippo-Story.
Pour aller plus loin
https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000038610069/
L’article 6315-1 du Code du travail modifié par Loi n°2019-486 du 22 mai 2019 – art.11 (V) applicable au 1er janvier 2020.
I. ― A l'occasion de son embauche, le salarié est informé qu'il bénéficie tous les deux ans d'un entretien professionnel avec son employeur consacré à ses perspectives d'évolution professionnelle, notamment en termes de qualifications et d'emploi. Cet entretien ne porte pas sur l'évaluation du travail du salarié. Cet entretien comporte également des informations relatives à la validation des acquis de l'expérience, à l'activation par le salarié de son compte personnel de formation, aux abondements de ce compte que l'employeur est susceptible de financer et au conseil en évolution professionnelle.
Cet entretien professionnel, qui donne lieu à la rédaction d'un document dont une copie est remise au salarié, est proposé systématiquement au salarié qui reprend son activité à l'issue d'un congé de maternité, d'un congé parental d'éducation, d'un congé de proche aidant, d'un congé d'adoption, d'un congé sabbatique, d'une période de mobilité volontaire sécurisée mentionnée à l'article L. 1222-12, d'une période d'activité à temps partiel au sens de l'article L. 1225-47 du présent code, d'un arrêt longue maladie prévu à l'article L. 324-1 du code de la sécurité sociale ou à l'issue d'un mandat syndical. Cet entretien peut avoir lieu, à l'initiative du salarié, à une date antérieure à la reprise de poste.
II. ― Tous les six ans, l'entretien professionnel mentionné au I du présent article fait un état des lieux récapitulatif du parcours professionnel du salarié. Cette durée s'apprécie par référence à l'ancienneté du salarié dans l'entreprise.
Cet état des lieux, qui donne lieu à la rédaction d'un document dont une copie est remise au salarié, permet de vérifier que le salarié a bénéficié au cours des six dernières années des entretiens professionnels prévus au I et d'apprécier s'il a :
1° Suivi au moins une action de formation ;
2° Acquis des éléments de certification par la formation ou par une validation des acquis de son expérience ;
3° Bénéficié d'une progression salariale ou professionnelle.
Dans les entreprises d'au moins cinquante salariés, lorsque, au cours de ces six années, le salarié n'a pas bénéficié des entretiens prévus et d'au moins une formation autre que celle mentionnée à l'article L. 6321-2, son compte personnel est abondé dans les conditions définies à l'article L. 6323-13.
Pour l'application du présent article, l'effectif salarié et le franchissement du seuil de cinquante salariés sont déterminés selon les modalités prévues à l'article L. 130-1 du code de la sécurité sociale.
III. ― Un accord collectif d'entreprise ou, à défaut, de branche peut définir un cadre, des objectifs et des critères collectifs d'abondement par l'employeur du compte personnel de formation des salariés. Il peut également prévoir d'autres modalités d'appréciation du parcours professionnel du salarié que celles mentionnés aux 1° à 3° du II du présent article ainsi qu'une périodicité des entretiens professionnels différente de celle définie au I.
https://www.legifrance.gouv.fr/codes/id/LEGIARTI000037385739/2019-01-01/
Article L6321-2 Modifié par LOI n°2018-771 du 5 septembre 2018 - art. 8 (V)
Toute action de formation qui conditionne l'exercice d'une activité ou d'une fonction, en application d'une convention internationale ou de dispositions légales et règlementaires […].
IMPORTANT
https://travail-emploi.gouv.fr/formation-professionnelle/entreprise-et-formation/entretien-professionnel
Epidémie de COVID-19 : Adaptation du dispositif des entretiens professionnels. Dans le cadre du contexte de l’épidémie de COVID-19, l’ordonnance du 1er avril 2020 prévoit deux adaptations :
- les entretiens prévus en 2020, faisant l’état des lieux récapitulatif du parcours professionnel pourront avoir lieu jusqu’au 31 décembre 2020, (la date butoir initiale était le 7 mars 2020) et peuvent à titre dérogatoire se dérouler en visio-conférence.
- Les dispositions qui prévoient un abondement correctif au CPF du salarié sont suspendues en 2020. Elles s’appliqueront de nouveau à partir du 1er janvier 2021.
https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000038610061/
Article L6323-13 du Code du travail Modifié par LOI n°2019-486 du 22 mai 2019 - art. 11 (V)
« Dans les entreprises d'au moins cinquante salariés, lorsque le salarié n'a pas bénéficié, durant les six ans précédant l'entretien mentionné au II de l'article L. 6315-1, des entretiens prévus au même article L. 6315-1 et d'au moins une formation autre que celle mentionnée à l'article L. 6321-2, un abondement est inscrit à son compte dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat et l'entreprise verse, dans le cadre de ses contributions au titre de la formation professionnelle, une somme dont le montant, fixé par décret en Conseil d'Etat, ne peut excéder six fois le montant annuel mentionné à l'article L. 6323-11. Le salarié est informé de ce versement.
Dans le cadre des contrôles menés par les agents mentionnés à l'article L. 6361-5, lorsque l'entreprise n'a pas opéré le versement prévu au premier alinéa du présent article ou a opéré un versement insuffisant, elle est mise en demeure de procéder au versement de l'insuffisance constatée dans le respect de la procédure contradictoire mentionnée à l'article L. 6362-10.
A défaut, l'entreprise verse au Trésor public un montant équivalent à l'insuffisance constatée majorée de 100 %.
Ce versement est établi et recouvré selon les modalités ainsi que sous les sûretés, garanties et sanctions applicables aux taxes sur le chiffre d'affaires.
Le contrôle et le contentieux de ce versement sont opérés selon les règles applicables en matière de taxe sur le chiffre d'affaires.
Pour l'application du premier alinéa du présent article, l'effectif salarié et le franchissement du seuil de cinquante salariés sont déterminés selon les modalités prévues à l'article L. 130-1 du code de la sécurité sociale. »
Synthèse
L’entretien annuel de performance réalisé dans certaines entreprises n’a aucun caractère obligatoire, mais l’entretien professionnel est légalement obligatoire pour toutes les entreprises d’au moins 50 salariés depuis mars 2014.
Les sujets abordés par le manager de proximité (ou RH) visent à valider la pertinence des actions de formations suivies par le salarié. Cet entretien est un temps dédié aux explications des différents dispositifs de formations disponibles pour le salarié. Le manager valide avec le salarié les actions utiles au développement de ses compétences (savoir, savoir-faire, savoir-être) dans l’anticipation d’une évolution de carrière soutenue par la mobilité interne.
Un point est réalisé lors du bilan au bout de six ans concernant les actions de formation et les évolutions salariales et professionnelles dont a bénéficié le salarié. Le résultat des bilans est inclus dans la consultation du CSE sur la politique sociale de l’entreprise, les conditions de travail et l’emploi.
Depuis le 1er janvier 2019, l’employeur doit donner au salarié de nouvelles informations lors de l'entretien, à savoir l’activation sur son compte personnel de formation (CPF), les abondements que l’entreprise est susceptible de financer et le conseil en évolution professionnelle (dispositif d’accompagnement gratuit susceptible de favoriser l’évolution et la sécurisation de son parcours professionnel).
A compter du 1er janvier 2021 l’employeur doit justifier de la bonne tenue des entretiens professionnels tous les 2 ans et du suivi d’une formation considérée comme non obligatoire.
Le comité social et économique (CSE) doit être consulté sur la mise en place des entretiens professionnels au titre de ses attributions générales.
L’employeur doit aussi mettre à la disposition du CSE, éventuellement via la base de données économiques sociales (BDES), le nombre de salariés bénéficiaires d’un entretien professionnel, en vue de la consultation sur la politique sociale de l’entreprise.
Cette actualité complète les informations contenues dans l’article Hippo-story : l’entretien professionnel.
Ce point spécifique peut être traité lors d’une formation sur-mesure « Approfondissements Elu du CSE ».
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